Le rassemblement citoyen du 1er février devant le Conseil Régional, en soutien aux associations malmenées par la Région fût un succès: plus de 300 personnes présentes et une bonne couverture médiatique.
Sur ces deux points nos espérances furent comblées.
Toutefois, l’un des principaux objectifs n’a pas été atteint.
Xavier Bertrand, grand patron de l’exécutif régional, s’est déclaré quelques jours plus tôt dans les colonnes de la Voix du Nord “toujours à portée d’engueulade”.
Malgré les multiples appels lancés d’une seule voix par les participants, il n’est pas venu nous rencontrer.
Nous avions pourtant des questions à lui poser. Des questions pensées pour l’interpeller sur la courte vue d’une politique régionale hostile aux associations citoyennes:
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La Région peut-elle se passer de la diversité des mobilisations citoyennes face à l’urgence de la transition sociale et écologique ?
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Est-ce qu’entretenir des clivages entre chasseurs et autres usagers de la nature et entre zones rurales et urbaines est à même de rassembler les énergies ?
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Où sont les espaces de négociation et de débats, de co-construction des politiques publiques dans les territoires régionaux ? Comment et par qui sont-ils animés, avec quels objectifs, qui est invité ?
Impossible de poser ces questions au Président de la Région Hauts-de-France, donc. Mais notre manifestation ne pouvait pas être totalement ignorée, on nous a donc fait savoir qu’une délégation pouvait être reçue par M. Jean-Michel Taccoen, conseiller régional délégué à la biodiversité bien connu des associatifs œuvrant (de plus en plus difficilement) dans ce secteur.
Un interlocuteur fort peu pertinent au regard de la diversité des structures touchées et de la concentration du pouvoir entre les mains de Xavier Bertrand.
Mais on ne dira pas de nous que nous avons refusé le dialogue, alors que nous étions venus pour le réclamer: six d’entre nous se rendirent donc dans l’enceinte de l’institution pour échanger avec l’élu.
Voici un résumé succinct de l’entretien (petite précision: les propos rapportés ici ne le sont pas au mot près, il ne s’agit pas forcément des phrases exactes prononcées mais d’une reconstitution de mémoire et à partir de notes se voulant la plus proche possible)
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M. Taccoen: Je fais ce que je peux avec le budget que j’ai. Il a dû être diminué car sinon la Région allait être mise sous tutelle.
Certes, le budget de l’Environnement, puisque c’est de celui dont parle M. Taccoen, a été diminué. Mais il a diminué au moins 10 fois plus que le budget global de la Région (-40% contre -3%). Il s’agit donc d’un choix politique, au détriment des enjeux environnementaux. D’autre part, les associations n’ont pas seulement été touchées par des baisses, mais aussi par des suppressions pures et simples (quand par ailleurs d’autres associations proches des fédérations de chasse, en ont, elles, perçu davantage).
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M. Taccoen: Notre choix politique, c’est d’orienter l’argent public pour favoriser la création d’emplois par le travail
Cette réponse est venue juste après que nous mettions en avant la contradiction à provoquer la suppression d’emplois dans le secteur associatif alors que la priorité affichée de la Région est l’emploi. Nous avons peut-être mal compris le sens des propos de M. Taccoen, c’est possible, mais il nous a semblé que cette réponse sous-entendait qu’un emploi associatif valait moins qu’un emploi privé car non créé “par le travail” mais “avec l’argent public”. Peu importe que cet emploi au service de l’intérêt général provoque plus de richesses collectives que certains emplois privés.
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M. Taccoen: Notre ligne politique, ça a été: pas de subventions pour les associations anti-chasse, et pas pour ceux dont le champ d’action n’est pas régional.
Il semble que l’étiquette “anti-chasse” soit généreusement distribuée à nombre d’associations naturalistes qui ne se considèrent pas du tout comme tel, et nous avons fait remarquer à M. Taccoen que parmi les associations touchées que nous représentions, nombre ont une portée régionale, et ne peuvent être qualifiées d’anti-chasse. Nous avons essayé de défendre l’idée que ce clivage n’était pas pertinent.
En résumé, les critères mis en avant par M. Taccoen pour justifier des suppressions de subventions arbitrées, ne pouvaient ni expliquer ni justifier au moins une partie des cas que nous avons recensés, voir qui nous touchaient personnellement.
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M. Taccoen: La consigne de Xavier Bertrand, c’est de prévenir les associations touchées par des baisses ou suppression de subventions, des courriers doivent avoir été envoyés par les services. […] Quand on gère une association, comme quand on est chef d’entreprise, on doit être capable de s’adapter à des baisses de rentrées d’argent.
Nous avons témoigné de la grande brutalité des suppressions de subventions et de l’absence de communication envers les associations, car en l’absence de la possibilité de les prévoir, l’impact de la baisse sur leur santé financière est démultiplié. Nous avons cité l’exemple des AJOnc, à qui on a laissé entendre une baisse de 15% en juin 2017, puis annoncé une suppression totale en octobre pour l’année courante. M. Taccoen semblait vouloir donner l’impression qu’il n’y était pour rien.
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M. Taccoen: Avec le budget dont nous disposons, nous privilégions les appels à projet, auxquels vous pouvez tout à fait adresser des réponses, et je vous invite à le faire.
Nous avons constaté depuis longtemps cette mutation du soutien des collectivités au monde associatif: les subventions en soutien à un projet associatif sont progressivement remplacées par des appels à mettre en oeuvre un projet pré-défini unilatéralement, sans concertation avec les associations, à prendre ou à laisser. Cela transforme les salariés et bénévoles associatifs en prestataires, n’ayant plus la possibilité de construire par eux-même les actions et les projets qui leur semblent les plus pertinents au regard de leur expertise de terrain.
D’autre part, quelle chance réelle aura par exemple une association abusivement étiquetée « anti-chasse » par l’exécutif régional d’être retenue?
M. Taccoen a par ailleurs indiqué qu’il était tout à fait favorable au dialogue avec nous, et que d’après lui notre préoccupation commune pour la biodiversité devrait nous rapprocher.
Il n’a pas apporté de réponse à notre appel à dialoguer également avec ses collègues délégués à d’autres secteurs associatifs touchés et représentés par notre collectif, et surtout avec le Président Xavier Bertrand, réel décisionnaire et comptable des choix politiques, et notamment des arbitrages budgétaires.
L’entrevue s’est donc conclue sans aucune avancée pour les associations maltraitées et fragilisées représentées par notre collectif Vent d’Assos.
Nous en prenons acte et poursuivons la mobilisation en vue, notamment, de porter nos revendications directement à Xavier Bertrand.
Appel à mobilisation le 1er février
Depuis plusieurs mois, de nombreux acteurs associatifs sont confrontés à des méthodes du Conseil Régional Hauts de France qui les mettent gravement en difficulté : aucune lisibilité sur les critères d’attribution des subventions, absence de réponses ou réponses tardives, réduction voire suppression pure et simple des financements sans aucune explication…
Ces associations remplissent pourtant des missions d’intérêt général et constituent de vraies richesses pour le territoire et ses habitant(e)s! Pour contester cette maltraitance organisée, Vent d’Assos Hauts-de-France (un collectif de citoyens, salariés et bénévoles associatifs) vous invite à un rassemblement symbolique devant le parvis du Conseil Régional à Lille le jeudi 1er février à 12h. Nous comptons sur votre mobilisation! Merci de relayer cet appel autour de vous! Collectif Vent d’Assos Hauts-de-France |
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